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Théodore Georgopoulos La séparation horizontale des pouvoirs en France et en Allemagne à l’épreuve du droit communautaire : la fonction de contre-pouvoir.
Dalloz, Nouvelle bibliothèque des thèses, 2005 (recension : Annuaire de droit européen 2005)
La thèse de Théodore Georgopoulos s’inscrit dans un courant de plus en plus significatif parmi les thèses de droit public depuis 10 ans : la mise en perspective du droit communautaire et du droit constitutionnel. Si l’on peut d’emblée se demander ici s’il s’agit plutôt d’une évolution du droit communautaire ou du droit constitutionnel, on doit, en tous cas, distinguer plusieurs types de projets et d’apports scientifiques.
Il y a les études de droit constitutionnel national « sous l’éclairage » du droit communautaire (Thèse d’Alain Ondoua : « Etude des rapports entre le droit communautaire et la Constitution en France. L’ordre constitutionnel comme guide au renforcement de la construction européenne », ou de Christophe Geslot : « Les élections municipales et la citoyenneté européenne (l’article 88-3 de la Constitution du 4 octobre 1958) », ou encore d’ Emmanuel Aubin : « La France face à la construction de la citoyenneté européenne. Etude des répercussions constitutionnelles de la citoyenneté de l’Union européenne »).
Il y a ensuite les thèses mettant en évidence la dimension constitutionnelle désormais acquise par l’intégration européenne : David Blanchard : « La constitutionnalisation de l’Union européenne », ou Jörg Gerkrath : « l’émergence d’un droit constitutionnel pour l’Europe ».
Il y a enfin les travaux auxquels s’ajoute plus spécialement la thèse de Théodore Georgopoulos, qui se donnent pour objectif de « revisiter » les fondamentaux du droit public en y intégrant la dimension communautaire. Il peut s’agir de la Constitution (Thèses de Thibault de Berranger : « Constitutions nationales et construction communautaire », ou d’Hélène Tourard : « L’internationalisation des Constitutions nationales »), et de questions liées, comme la justice constitutionnelle (Olivier Dord : « Cours constitutionnelles nationales et normes européennes »), ou le contrôle de constitutionnalité ( Xavier Magnon : « Contrôle de constitutionnalité et droit communautaire devant les juges constitutionnels français et italien »). Il peut s’agir de la souveraineté (Florence Chaltiel : « La souveraineté de l’Etat et l’Union européenne, l’exemple français, recherches sur la souveraineté de l’Etat membre ») ou de la puissance publique (Charlotte Denizeau : « L’idée de puissance publique à l’épreuve de l’Union européenne »).
Réflexion actualisée sur les notions de Constitution, de souveraineté, de puissance publique, et donc, ici, de séparation des pouvoirs, voilà le véritable contexte doctrinal de la thèse sous commentaire plutôt que celui, concevable a priori, à la fois plus proche et plus étroit, des études relatives à l’incidence de l’intégration européenne sur certaines dimensions de la séparation des pouvoirs comme les thèses de Didier Blanc : « L’institution parlementaire face à la fonction législative communautaire », ou d’Alice Fuchs-Cessot : « La construction européenne et la V° République : l’abaissement du Parlement français ».
Il faut aussi remarquer l’utilisation fréquente, dans ces thèses, de la méthode comparative permettant de dépasser la question spéciale du rapport entre l’ordre communautaire et un seul ordre national : cette approche spéciale, en effet, court toujours le risque d’être inscrite dans ce contexte national pour ne pas dire qu’elle en serait prisonnière. Dans les études précités, notons que Thibaut de Berranger étudie douze Etats, Olivier Dord en observe six et Xavier Magnon deux, comme Théodore Georgopoulos. La parenté méthodologique avec le travail du Professeur Magnon va plus loin : celui-ci revendiquait une vision particulière du comparatisme, due à la présence d’un tertium comparationis (l’ordre communautaire), référent constant, et il affichait sa volonté d’éclairer systématiquement sa comparaison au moyen de la théorie du droit. C’est exactement ce que fait Théodore Georgopoulos. Il étudie successivement des questions fondamentales de droit constitutionnel et de droit communautaire, avec une dimension théorique réelle, et la démarche comparative permet d’ancrer les analyses dans deux réalités, deux corps d’exemples et d’éclairer ces mêmes analyses grâce à deux bibliothèques doctrinales particulièrement riches. Ce type de comparatisme enrichit, élève le débat et ne nuit en rien à la ligne et à la cohérence du discours.
Cette thèse contribue donc à dessiner un nouveau droit constitutionnel, voire un nouveau droit public, que l’on peut, certes, désigner comme le droit constitutionnel de l’Union européenne mais qui est surtout le droit constitutionnel dans l’Union européenne, tant il semble désormais vain d’appréhender cette branche du droit public dans un Etat membre de l’Union sans prendre en considération l’appartenance européenne. Cet espace doctrinal constitutionnel, ne reposant plus sur une séparation tranchée entre la dimension européenne et la dimension nationale, préfigure sans doute une conception qui, prochainement, permettra d’imposer, notamment en jurisprudence, une vision plus cohérente et apaisée des relations entre le droit de l’Union et les constitutions des Etats membres.
Théodore Georgopoulos distingue deux problématiques, la séparation entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif d’une part, et la question du pouvoir juridictionnel par ailleurs. Il choisit de surcroît de donner une plus-value à sa recherche en l’éclairant au moyen de la notion et de la fonction de « contre-pouvoir ». La thèse met ainsi en évidence, avec rigueur et sans présupposés, la fonction de contre-pouvoir du pouvoir législatif dans l’élaboration de la norme communautaire et celle de contre-pouvoir détenue par l’exécutif quant à l’exécution de cette norme. Il montre ensuite en quoi l’ordre communautaire stimule à certains égards la fonction de contre-pouvoir du juge tout en la neutralisant par ailleurs.
Si l’on rencontre forcément dans un tel champs des sujets déjà largement connus, et si la spécificité communautaire paraît parfois un peu minorée, il n’en reste pas moins que cette lecture d’ensemble frappe par sa cohérence et sa rigueur, de sorte qu’elle apparaît désormais comme une pièce essentielle de cette nouvelle culture de droit public imposée et dessinée par les avancées de l’intégration européenne .
Il y a les études de droit constitutionnel national « sous l’éclairage » du droit communautaire (Thèse d’Alain Ondoua : « Etude des rapports entre le droit communautaire et la Constitution en France. L’ordre constitutionnel comme guide au renforcement de la construction européenne », ou de Christophe Geslot : « Les élections municipales et la citoyenneté européenne (l’article 88-3 de la Constitution du 4 octobre 1958) », ou encore d’ Emmanuel Aubin : « La France face à la construction de la citoyenneté européenne. Etude des répercussions constitutionnelles de la citoyenneté de l’Union européenne »).
Il y a ensuite les thèses mettant en évidence la dimension constitutionnelle désormais acquise par l’intégration européenne : David Blanchard : « La constitutionnalisation de l’Union européenne », ou Jörg Gerkrath : « l’émergence d’un droit constitutionnel pour l’Europe ».
Il y a enfin les travaux auxquels s’ajoute plus spécialement la thèse de Théodore Georgopoulos, qui se donnent pour objectif de « revisiter » les fondamentaux du droit public en y intégrant la dimension communautaire. Il peut s’agir de la Constitution (Thèses de Thibault de Berranger : « Constitutions nationales et construction communautaire », ou d’Hélène Tourard : « L’internationalisation des Constitutions nationales »), et de questions liées, comme la justice constitutionnelle (Olivier Dord : « Cours constitutionnelles nationales et normes européennes »), ou le contrôle de constitutionnalité ( Xavier Magnon : « Contrôle de constitutionnalité et droit communautaire devant les juges constitutionnels français et italien »). Il peut s’agir de la souveraineté (Florence Chaltiel : « La souveraineté de l’Etat et l’Union européenne, l’exemple français, recherches sur la souveraineté de l’Etat membre ») ou de la puissance publique (Charlotte Denizeau : « L’idée de puissance publique à l’épreuve de l’Union européenne »).
Réflexion actualisée sur les notions de Constitution, de souveraineté, de puissance publique, et donc, ici, de séparation des pouvoirs, voilà le véritable contexte doctrinal de la thèse sous commentaire plutôt que celui, concevable a priori, à la fois plus proche et plus étroit, des études relatives à l’incidence de l’intégration européenne sur certaines dimensions de la séparation des pouvoirs comme les thèses de Didier Blanc : « L’institution parlementaire face à la fonction législative communautaire », ou d’Alice Fuchs-Cessot : « La construction européenne et la V° République : l’abaissement du Parlement français ».
Il faut aussi remarquer l’utilisation fréquente, dans ces thèses, de la méthode comparative permettant de dépasser la question spéciale du rapport entre l’ordre communautaire et un seul ordre national : cette approche spéciale, en effet, court toujours le risque d’être inscrite dans ce contexte national pour ne pas dire qu’elle en serait prisonnière. Dans les études précités, notons que Thibaut de Berranger étudie douze Etats, Olivier Dord en observe six et Xavier Magnon deux, comme Théodore Georgopoulos. La parenté méthodologique avec le travail du Professeur Magnon va plus loin : celui-ci revendiquait une vision particulière du comparatisme, due à la présence d’un tertium comparationis (l’ordre communautaire), référent constant, et il affichait sa volonté d’éclairer systématiquement sa comparaison au moyen de la théorie du droit. C’est exactement ce que fait Théodore Georgopoulos. Il étudie successivement des questions fondamentales de droit constitutionnel et de droit communautaire, avec une dimension théorique réelle, et la démarche comparative permet d’ancrer les analyses dans deux réalités, deux corps d’exemples et d’éclairer ces mêmes analyses grâce à deux bibliothèques doctrinales particulièrement riches. Ce type de comparatisme enrichit, élève le débat et ne nuit en rien à la ligne et à la cohérence du discours.
Cette thèse contribue donc à dessiner un nouveau droit constitutionnel, voire un nouveau droit public, que l’on peut, certes, désigner comme le droit constitutionnel de l’Union européenne mais qui est surtout le droit constitutionnel dans l’Union européenne, tant il semble désormais vain d’appréhender cette branche du droit public dans un Etat membre de l’Union sans prendre en considération l’appartenance européenne. Cet espace doctrinal constitutionnel, ne reposant plus sur une séparation tranchée entre la dimension européenne et la dimension nationale, préfigure sans doute une conception qui, prochainement, permettra d’imposer, notamment en jurisprudence, une vision plus cohérente et apaisée des relations entre le droit de l’Union et les constitutions des Etats membres.
Théodore Georgopoulos distingue deux problématiques, la séparation entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif d’une part, et la question du pouvoir juridictionnel par ailleurs. Il choisit de surcroît de donner une plus-value à sa recherche en l’éclairant au moyen de la notion et de la fonction de « contre-pouvoir ». La thèse met ainsi en évidence, avec rigueur et sans présupposés, la fonction de contre-pouvoir du pouvoir législatif dans l’élaboration de la norme communautaire et celle de contre-pouvoir détenue par l’exécutif quant à l’exécution de cette norme. Il montre ensuite en quoi l’ordre communautaire stimule à certains égards la fonction de contre-pouvoir du juge tout en la neutralisant par ailleurs.
Si l’on rencontre forcément dans un tel champs des sujets déjà largement connus, et si la spécificité communautaire paraît parfois un peu minorée, il n’en reste pas moins que cette lecture d’ensemble frappe par sa cohérence et sa rigueur, de sorte qu’elle apparaît désormais comme une pièce essentielle de cette nouvelle culture de droit public imposée et dessinée par les avancées de l’intégration européenne .
Dates
Crée le 23 janvier 2018